En février 2019, le Conseil constitutionnel avait formulé plusieurs recommandations suite aux élections législatives de 2017.

La Loi n°2019- 1269 du 2 décembre 2019 de clarification du droit électoral en tire les conséquences s’agissant notamment des règles de financement des campagnes électorales mais aussi des règles d’inéligibilité et de l’encadrement de la propagande et des opérations électorales.

Toutefois, l’ensemble de ces dispositions ne sera applicable qu’à compter du 30 juin 2020, soit après les prochaines élections municipales, à l’exception de l’article 6 de ladite loi relative aux nouvelles règles d’inéligibilités.

Clarification des règles de financement

Les candidats pourront à partir de juin 2020 recueillir des dons par le biais de plateformes de paiement en ligne du type Paypal, etc. Cette adaptation aux nouvelles technologies ne se fera pas sans une précision des modalités de traçabilité des opérations financières puisqu’il s’agit d’une véritable dérogation au principe selon lequel aucun tiers à l’exception du mandataire financier ne peut intervenir dans le recueil des dons.

Le périmètre d’intervention des experts-comptables sera réduit afin de simplifier les démarches administratives des candidats dont les dépenses ne sont pas prises en charge par l’État. A parti de juin 2020, les candidats ne recueillant pas le pourcentage de suffrages exprimés donnant droit au remboursement des dépenses électorales et dont les recettes et les dépenses n’excèdent pas un certain montant, seront dispensés du recours à un expert-comptable.

Par ailleurs, il sera également fait interdiction aux personnes morales autres que les formations politiques et les établissements bancaires, de garantir les prêts contractés par les candidats.

  • Sur les comptes de campagne :

La loi clarifie également les délais dans lesquels la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) contrôlera les comptes des candidats : dans les six mois suivants le dixième vendredi qui suit le premier tour de l’élection (et non plus dans les six mois suivants le dépôt du compte lui-même).

Le chapitre V de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen a également été modifié.

Dans le code électoral, les règles relatives au dépôt des comptes de campagne sont mieux distinguées de celles qui sont relatives à leur contrôle et à leur publication.

  1. La propagande et les opérations électorales

A partir de juin 2020, les réunions électorales seront interdites la veille du scrutin. La campagne électorale s’achèvera désormais concrètement le vendredi à 23h59. Ainsi, à compter du samedi à zéro heure, il sera interdit de :

  • Distribuer ou faire distribuer des bulletins, circulaires et autres documents
  • Diffuser ou faire diffuser par tout moyen de communication au public par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale
  • Procéder, par un système automatisé ou non, à l’appel téléphonique en série des électeurs afin de les inciter à voter pour un candidat
  • Tenir une réunion électorale

Il sera à partir de juin 2020 interdit aux candidats de faire figurer sur leurs bulletins de vote « la photographie ou la représentation de toute personne » autre que le ou les candidats, afin de garantir la sincérité du scrutin et d’éviter tout détournement d’image. En clair, les bulletins de vote ne pourront pas comporter d’autre photographie que celle du ou des candidats à l’élection concernée. Cependant, pour les villes de Paris, Lyon et Marseille (où le vote se fait par arrondissement ou par secteur), pourront figurer sur le bulletin de vote, le nom et la photographie du candidat à l’élection municipale de la ville.

De manière plus anecdotique, et sans doute face au succès (relatif) des listes animalistes aux élections européennes de 2019, qui avait décoré leurs bulletins de vote d’attendrissants animaux, il sera désormais interdit de faire figurer des photos d’animaux sur les bulletins.

En matière de lutte contre l’affichage sauvage, le maire ou à défaut le préfet pourra, après une mise en demeure du ou des candidats en cause, procéder à la dépose d’office des affiches.

S’agissant de l’élection présidentielle ou des élections européennes, il faudra dorénavant attendre la fermeture du dernier bureau de vote sur le territoire métropolitain pour que les résultats puissent être communiqués.

  1. Les inéligibilités

Les pouvoirs du juge de l’élection ont été clarifiés (article L. 118-3 du code électoral). Désormais, le juge pourra déclarer le candidat inéligible « en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales ». Ainsi, une simple erreur matérielle sans volonté de fraude n’entraînera plus l’inéligibilité du candidat.

S’agissant de certains membres du corps préfectoral, leur régime d’inéligibilité est renforcé : les sous-préfets, les secrétaires généraux de préfectures et les directeurs de cabinet de préfets sont inéligibles aux élections municipales dans le département où ils ont exercé leurs fonctions depuis moins de deux ans (au lieu d’année année auparavant)

Ainsi, l’article L.231 du code électoral dispose désormais que :

« Ne sont pas éligibles dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de trois ans les préfets de région et les préfets, depuis moins de deux ans les sous-préfets, les secrétaires généraux de préfecture et les directeurs de cabinet de préfet, depuis moins d’un an les sous-préfets chargés de mission auprès d’un préfet et les secrétaires généraux ou chargés de mission pour les affaires régionales ou pour les affaires de Corse ».

Il est important de noter que, contrairement au reste de la loi, cette disposition sera applicable dès les élections municipales de 2020.

  1. Stabilité du droit dans l’année qui précède le scrutin

Est inséré l’article L.567-1 A disposant que :

« Il ne peut être procédé à une modification du régime électoral ou du périmètre des circonscriptions dans l’année qui précède le premier tour d’un scrutin ».

Ce principe d’immutabilité du droit électoral dans l’année précédant l’élection, qui relevait jusqu’ici davantage d’une tradition républicaine, s’appliquera à l’ensemble des élections, à l’exception de l’élection présidentielle régie par la loi organique du 6 novembre 1962.

 

Jocelyn AUBERT

Emmanuelle VIEUX-ROCHAS

 Avocats au Barreau de Lyon

ATV AVOCAT ASSOCIES