Le Parlement a adopté Dimanche 22 mars 2020 un projet de loi prévoyant, outre des mesures d’effet immédiat afférentes à la déclaration d’état d’urgence sanitaire ou aux élections municipales, d’autoriser le gouvernement à légiférer par Ordonnances dans plusieurs domaines de la Loi intéressant plus particulièrement les Collectivités dans le cadre de l’exercice de leurs compétences en matière de marchés publics, d’urbanisme et de droit de l’environnement.
Le Gouvernement est donc habilité à prendre directement des mesures permettant notamment d’adapter à la situation particulière liée au COVID-19 :
- les règles inhérentes à la passation ainsi qu’à l’exécution des contrats relevant du droit de la Commande Publique : seront principalement visées les dispositions relatives aux délais de paiement, aux pénalités contractuelles, aux modalités de résiliation, étant précisé que pourront être également concernées les stipulations contractuelles ayant un objet identique ;
- les délais applicables au dépôt et au traitement des déclarations et demandes présentées aux autorités administratives : le texte évoque les délais dans lesquels une décision peut ou doit être prise ou peut naitre, ce qui renvoie implicitement aux régimes d’acquisition par les administrés de décisions administratives implicites de rejet ou d’acceptation ;
- les règles applicables en matière de consultations et de procédures d’enquête publique ou exigeant une consultation d’une commission consultative ou d’un organe délibérant d’une collectivité territoriale ou de ses établissements publics ;
Ainsi, en matière de commande publique, il apparaît probable que soit prochainement accordés des facilités quant aux délais d’exécution ainsi qu’un moratoire (ou à tout le moins un mécanisme de remise sur des périodes ciblées) sur les pénalités de retard pendant la période de confinement, et ce dans un contexte où la plupart des entreprises du BTP sont à l’arrêt.
On notera à cet égard que les représentants de la filière et le Gouvernement ont signé un communiqué de presse commun le 22 mars 2020 en faveur d’une continuité de l’activité et des chantiers, sous réserve de mise en place de mesures permettant d’assurer la protection de salariés et de prioriser les chantiers les plus urgents.
En outre, et s’agissant des règles de passation des contrats de la commande publique, le Ministère de l’Economique n’envisageait pas jusqu’à très récemment d’adopter des règles de passation spécifiques et dérogatoires, la Direction des Affaires ayant à ce propos rappelé dans une fiche parue le 18 mars 2020 les possibilités déjà offertes par le code de la commande publique et permettant :
- d’appliquer des délais réduits de publicité en cas de besoin urgent (R. 2161-8 du CCP)
- de mettre en œuvre une procédure sans publicité ni mise en concurrence en cas d’urgence impérieuse (R. 2122-1 du CCP)
La DAJ rappelait toutefois que ces mécanismes n’avaient vocation à répondre qu’à des besoins urgents en matière de travaux, fournitures et services et qui ne pouvant être différés nonobstant le confinement actuel.
Au vu de l’habilitation accordée au Gouvernement, on doit également s’attendre à des modification des règles conditionnant la naissance des décisions implicites de rejet et d’acceptation faisant suite à une demande déposée en ce sens par un administré, ce qui peut notamment impacter les règles afférentes à l’instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme et les conditions dans lesquelles les délais d’instructions sont prorogés pour solliciter l’avis de services ou d’organismes compétents, ou encore les conditions de naissance de décisions implicites de refus ou d’acceptation.
De même, et s’agissant des mesures affectant les consultations du public, ont vocation à être concernées toutes les procédures où l’organisation d’une enquête publique constitue un préalable obligatoire à l’approbation d’un document d’urbanisme (PLU, SCOT…) et à la délivrance de certaines autorisations préfectorales telles que celles déclarant d’utilité publique d’un projet d’expropriation, autorisant des projets soumis à autorisation environnementale au titre de la Loi sur l’Eau ou de la législation sur les Installations Classées pour la Protection de l’Environnement.
Le texte voté par le Parlement prévoit enfin que l’ensemble de ces mesures décidées par Ordonnances dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la Loi pourront s’appliquer rétroactivement jusqu’au 12 mars 2020.
Sébastien THOINET, Avocat Associé
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